Ça ne se fait pas de croire que la beauté reste un ingrédient incontournable de l'art. Ça fait plouc ou réactionnaire. Même si certaines autorités de l'art contemporain avouent la travailler - par exemple Daniel Buren, pour qui l'artiste se doit d'apporter de la beauté à un monde qui en manque tant. C'est en visitant la galerie d'art chinois de Sydney - White Rabbit, une des rares galeries privées du pays - que j'ai compris pourquoi c'était si important pour moi, pourquoi l'art qui prétend s'en passer me gonfle (oui, c'est vulgaire à dire, mais c'est surtout vulgaire à faire): il me semble que la beauté s'adresse à l'affect, à l'émotion, au sentiment. L'art contemporain qui fait l'impasse sur cette dimension se contente de travailler le concept - au point que certaines œuvres n'existent qu'accompagnées de leurs sous-titres ou de la culture de leurs spectateurs. Celui-là s'adresse au mental, exclusivement. Parfois avec humour, parfois avec conviction militante, parfois avec invention. Mais il me semble que ni le rire ni la colère ni l'imagination ne souffrent de parler aussi aux émotions, et de le faire en cherchant le beau.
La galerie White Rabbit de Sydney. Et la maquette de Pékin en riz et porcelaine de Zhou Jie.
Là, il faudrait se lancer dans un débat philosophique sur le Beau, le Bon, le Vrai - mais mon idée n'est pas d'entrer dans une discussion à majuscules. On pourrait aussi s'écharper sur ce qui est beau et ne l'est pas... Pour revenir à Daniel Buren, ils seront bien sûr nombreux les détracteurs, à considérer que son travail offense la beauté! Il y a tout plein de "jolies" choses que je juge affreuses, évidemment. Mais, avec la conscience de la relativité de telles définitions, variables dans le temps et l'espace, je préfère m'en tenir au désir que l'œuvre se pose la question de la beauté, en prenant le risque de déplaire ou de rater. Mais au moins, la chercher. Je suis convaincue que tout ce qui contribue à aggraver les clivages (entre le corps, le cœur, l'esprit) compte parmi les mauvaises actions. Parce que le clivage affaiblit l'humain dans l'homme (et il n'a pas besoin de ça) et parce qu'il nous rend incompréhensibles à nous-mêmes.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire